Deux arrêts du Conseil d’État, parus en 2013 et 2017, ont instauré un nouveau régime fiscal pour les SEL (Société d’exercice libéral) ; un régime entré en vigueur au 1er janvier 2024 et qui impacte tant la fiscalité que le régime social des rémunérations des dirigeants et associés de ces structures. Nos experts vous détaillent les changements et vous partagent les questions qui restent en suspens.
À compter du 1er janvier 2024, il conviendra de différencier la rémunération perçue par les associés de SEL provenant de :
- leurs responsabilités de direction
- leurs activités techniques relevant de leur expertise.
Les rétributions perçues au titre de leurs responsabilités de gérance demeurent soumises à l’imposition dans la catégorie des traitements et salaires :
- soit sous la forme d’une rémunération d’assimilé salarié
- soit selon l’article 62 du CGI (Code général des impôts)
Les rémunérations associées aux activités techniques seront, quant à elles imposables dans la catégorie des BNC (Bénéfices non commerciaux).
Si un lien de subordination existe, cependant, entre un associé et la SEL au titre de l’exercice de cette activité, l’ensemble des rémunérations de l’associé seront imposées dans la catégorie des traitements et salaires. Cette règle s’applique également si la ventilation entre fonctions techniques et de direction ne peut être réalisée. Le contribuable doit être, toutefois, en mesure d’apporter les éléments de preuve permettant de justifier de cette impossibilité.
💡 À noter
L’absence de suivi des temps ne saurait justifier de cette impossibilité. Une répartition proportionnelle (10/90, 20/80 ou 30/70, en fonction de la taille de l’entreprise) pourrait permettre de satisfaire à cette exigence.
Les associés de SEL ne sont pas tenus de facturer la TVA sur les rémunérations techniques qu’ils perçoivent, ces dernières étant en dehors du champ d’application de cette taxe. En conséquence, ces rémunérations ne sont pas soumises à l’obligation de facturation énoncée à l’article 289 du Code général des impôts (CGI).
En ce qui concerne la cotisation foncière des entreprises (CFE), l’imposition est établie au nom de la SEL, en tant qu’entité exerçant l’activité imposable.
L’administration fiscale considère qu’un associé de SEL, qui n’exerce pas l’activité en nom propre, ne répond pas à la définition d’entrepreneur individuel. Par conséquent, il lui est impossible de bénéficier de l’option fiscale à l’impôt sur les sociétés, comme stipulé à l’article 1655 sexies du CGI.
Pour la déclaration des rémunérations, les associés doivent se conformer à l’article 97 du CGI, impliquant le dépôt d’une déclaration contrôlée conformément à l’article 172 du même code (formulaire n° 2035).
Malgré les clarifications de l’administration, plusieurs questions restent en suspens, notamment concernant :
- la possibilité de ne pas rémunérer les fonctions de direction (gérant ou mandataire) et donc de considérer 100 % de la rémunération en rémunération technique
- la date de déploiement du guichet unique permettant l’immatriculation des associés de SEL,
- la déclaration sur la DAS2 de la rémunération perçue par l’associé de SEL (ne s’agissant pas en tant que tel d’honoraires, devra-t-elle y être déclarée ?)
- l’application du régime micro-BNC prévu par l’article 102 ter du CGI ouvert aux professionnels débutant leur activité et percevant des revenus non commerciaux dont le montant hors taxes n’excède pas 77 700 €
- etc.
Qu’en sera-t-il, par ailleurs, de la valorisation du fonds libéral (établie ou non au sein de la SEL) ?
Il conviendra également de prêter une attention particulière aux contrats de prévoyance des associés (les indemnités journalières étant habituellement indexées sur la rémunération de gérance).
Fiscalité des rémunérations
| Rémunération au titre du mandat social | Rémunération au titre de l’exercice de l’activité libérale | |||
| Sans lien de subordination avec la société | Avec lien de subordination avec la société | |||
| SELAS / SELAFA | Traitements et salaires (CGI, art.80 ter ; BOI-RSA-GER-10-30 n°500) |
BNC (CGI, art.92 ; BOI-RSA-GER-10-30 n°520) |
Traitements et salaires ; (CGI, art.80 ter ; BOI-RSA-GER-10-30 n°520) |
|
| SELARL | Gérant minoritaire | |||
| Associé non gérant | Non concerné | |||
| Gérant majoritaire | Article 62 du CGI (assimilé TS) (BOI-RSA-GER-10-30 n°510) |
BNC Sauf si fonctions indissociables du mandat : imposition selon l’article 62 du CGI (assimilé TS) |
Non concerné | |
Régime social des rémunérations
| Rémunération au titre du mandat social | Rémunération au titre de l’exercice de l’activité libérale | |||
| Sans lien de subordination avec la société | Avec lien de subordination avec la société | |||
| SELAS/SELAFA | Mandataire social | Assimilé salarié (régime général) |
Travailleurs indépendants (sécurité sociales des indépendants) |
Salarié de plein droit (régime général) |
| Associé non-mandataire | Non concerné | |||
| SELARL | Gérant minoritaire | Assimilé salarié (régime général) |
||
| Associé non gérant | Non concerné | |||
| Gérant majoritaire | Travailleurs indépendants (sécurité sociale des indépendants) |
Non concerné | ||
Versement social forfaitaire du régime micro-social : profession libérale réglementée 21,2%, non règlementée 21,1%
Source : ATH
Même si des précisions sont attendues, nos équipes restent à votre disposition pour tout complément d’information sur ce sujet.
N’hésitez pas à consulter votre contact habituel Baker Tilly pour tout conseil quant aux mesures possibles à adopter en fonction de votre statut et de la structure d’exercice de votre activité (mise en œuvre d’une nouvelle organisation juridique, de nouveaux modes de rémunération, établissement de bulletins de salaire…).